En 1919, la loi Volstead entre en vigueur aux États-Unis, provoquant une série de bouleversements inattendus dans les habitudes sociales et culturelles. À la même période, le droit de vote est accordé aux femmes en Grande-Bretagne et aux États-Unis, modifiant les rapports de force au sein des sociétés occidentales.
Face à ces transformations, les fabricants de vêtements accélèrent l’adaptation de leurs collections, tandis que la presse féminine multiplie les publications spécialisées. Les codes vestimentaires évoluent alors rapidement, portés par l’apparition de nouveaux matériaux industriels et une diffusion massive des images publicitaires.
Plan de l'article
- Les années 1920, une décennie de bouleversements sociaux et culturels
- Quels styles et innovations ont marqué la mode de cette époque ?
- Le rôle central des femmes : émancipation, nouvelles silhouettes et affirmation
- Magazines, publicité et héritage : comment la mode des années 1920 continue d’influencer aujourd’hui
Les années 1920, une décennie de bouleversements sociaux et culturels
Paris ne se contente plus de dicter les tendances : la capitale incarne le renouveau après les ravages de la Première Guerre mondiale. Les années folles bousculent l’ordre établi, imposant un tempo effréné. La mode, loin des conventions figées de la belle époque, épouse les désirs d’émancipation et de légèreté. Les femmes, animées par un esprit neuf, délaissent le corset, raccourcissent leurs jupes, se coupent les cheveux. L’androgynie s’affiche sans détour, portée par la silhouette rebelle de la garçonne.
Voici comment ces bouleversements se traduisent concrètement :
- Abandon du corset et essor des robes courtes
- Popularité des cheveux courts, symbole de liberté
- Influence du jazz et de l’art déco sur les lignes et accessoires
Dans les rues et les music-halls, le jazz résonne comme un appel à la nouveauté. Les clubs de la capitale, fréquentés par Mistinguett ou Joséphine Baker, vibrent d’une énergie contagieuse. Le fauteuil club, synonyme de confort moderne, devient l’emblème de cette rupture. Plumes, bandeaux, accessoires Art déco tapissent les vitrines, marquant la culture mode d’une empreinte inédite. Cette décennie, traversée par l’audace et la volonté de s’affranchir, propulse la mode vers un horizon résolument moderne.
L’Europe, et particulièrement la France, expérimente de nouveaux codes sociaux. La mode des années 1920 s’arrime à l’effervescence urbaine : elle ne se contente pas de suivre, elle devance. Les femmes s’affichent dans l’espace public, fument, dansent, investissent les clubs de nuit, ébranlant les normes héritées du passé.
Quels styles et innovations ont marqué la mode de cette époque ?
Le style flapper s’impose comme le visage d’une révolution. Les coupes se font droites, la taille s’abaisse, les courbes s’estompent : la robe Charleston, tubulaire, agrémentée de franges ou de paillettes, incarne ce souffle neuf. Cette esthétique, adoptée par les jeunes femmes urbaines, libère le mouvement. On aperçoit partout des bandeaux à plumes et des accessoires Art déco, des salles de danse jusqu’aux rues animées. Les cheveux, coupés très courts à la manière de Louise Brooks ou d’Irene Castle, achèvent de marquer la rupture.
Les créateurs français transforment durablement la décennie. Coco Chanel incarne la simplicité moderne : blazers pensés pour les femmes, robes épurées, omniprésence du noir. Sa Petite Robe Noire fait tomber les barrières sociales : l’élégance devient accessible, fonctionnelle. Jean Patou révolutionne le sportswear féminin : il équipe Suzanne Lenglen, introduit le maillot de bain pour femmes, dynamite les conventions sur les courts comme sur les plages.
Les maisons comme Lanvin ou Premet réinventent la robe de style et la robe garçonne. Les pages de Vogue, illustrées par Lepape ou Benito, façonnent l’imaginaire collectif. Ce tourbillon créatif s’accompagne d’une démocratisation : la mode s’inspire de la rue, des artistes, des vedettes comme Joséphine Baker, étoile de la Revue Nègre, qui impose une liberté de ton et d’allure inédite.
Le rôle central des femmes : émancipation, nouvelles silhouettes et affirmation
Pour comprendre ce bouleversement mode, il faut observer l’irruption des femmes sur le devant de la scène. Libérées du carcan du XIXe siècle, elles écartent le corset, raccourcissent les jupes, dévoilent les jambes. Le style flapper s’impose : la robe garçonne, droite et sans taille marquée, porte le désir d’une identité indépendante, affranchie de la domination masculine.
Ce vent nouveau s’enracine dans l’émancipation féminine qui s’accélère après la Première Guerre mondiale. Les femmes gagnent en autonomie après avoir travaillé dans les usines et servi dans les hôpitaux. À Paris, dans les clubs et sur les trottoirs, elles imposent une allure androgynique assumée. La coupe à la garçonne, popularisée par Louise Brooks, devient un emblème. La silhouette se simplifie, s’affine. Fumer en public, fréquenter les clubs de jazz, choisir ses partenaires : autant de gestes qui défient les anciennes règles, incarnés par des figures comme Violette Morris ou Joséphine Baker.
Quelques repères marquants illustrent ce basculement :
- La robe garçonne affirme une esthétique androgyne et indépendante.
- Le roman ‘La Garçonne’ de Victor Margueritte, sorti en 1922, devient le symbole d’une nouvelle liberté de mœurs.
- La danse Charleston, adoptée par Baker, impose un dynamisme inédit, jusque dans la conception des tenues.
La mode s’ouvre alors à des matériaux plus souples, à des coupes droites, à des accessoires Art déco. Les femmes expérimentent, bousculent les conventions. Chaque vêtement, chaque coupe de cheveux, chaque accessoire devient une façon d’affirmer sa voix et sa place dans la société.
Magazines, publicité et héritage : comment la mode des années 1920 continue d’influencer aujourd’hui
Dès les années 1920, la presse féminine joue un rôle moteur dans la diffusion des tendances. Vogue, dirigé par Condé Nast, impose une esthétique globale : de Paris à New York, les créations se propagent rapidement. L’essor des magazines spécialisés transforme la mode en industrie de l’image, orchestrant le désir autour de figures de la modernité, de Chanel à Jeanne Lanvin. Des illustrateurs comme Georges Lepape ou Benito signent des couvertures mythiques. La publicité s’empare du vestiaire féminin : parfums, cosmétiques, accessoires s’exposent, s’achètent, se rêvent. Aujourd’hui, ce désir orchestré s’est déplacé sur les réseaux sociaux, où la viralité des influenceurs prolonge la logique du rêve accessible.
La généralisation de la production de masse et l’adoption de la chaîne de montage dans l’industrie textile ouvrent la mode au plus grand nombre. Le prêt-à-porter, apparu après-guerre, puise dans cet héritage : coupe droite, simplicité, audace du noir, sportswear popularisé par Patou. Les décennies suivantes s’en inspirent : du New Look de Dior dans les années 1950 au minimalisme des années 1990, jusqu’au streetwear et à la mode numérique d’aujourd’hui.
Quelques tendances actuelles découlent directement de cette période foisonnante :
- La mode numérique poursuit le rêve d’une mode accessible à tous, portée par l’essor des plateformes et des créateurs en ligne.
- Les codes des années 1920, liberté, androgynie, multiplication des accessoires, irriguent le vocabulaire des créateurs : de Vivienne Westwood à Stella McCartney, l’affirmation reste intacte.
La mode, fidèle reflet des évolutions sociales, s’invente d’abord dans l’œil du photographe, s’impose à travers les médias, mute selon les avancées technologiques et les secousses économiques. Des années folles à aujourd’hui, le fil rouge de la réinvention ne s’est jamais rompu.